13 % de logements abordables, insuffisant pour faire pression sur les nouveaux logements haut de gamme avec vue sur le canal
4000 logements vont sortir de terre le long du canal à Anderlecht d’ici 2024, pour accueillir entre 12 000 et 15 000 nouveaux habitants. Sur ces 4 000 logements, on compte environ 515 logements publics, dont seulement 254 sociaux. Quand on prévoit 13% de logements abordables sur l’ensemble des projets, dans une commune comme Anderlecht et dans une Région qui connaît une crise du logement sans précédent, on peut difficilement prétendre vouloir répondre aux besoins sociaux des habitants.
Et pourtant, à entendre le bourgmestre socialiste Fabrice Cumps, le master-plan de la commune PS-Ecolo « n’est pas de la gentrification »... Dans un récent article de la DH, le bourgmestre argumente : « on ne met personne dehors ». Certes, le gouvernement bruxellois ne met personne physiquement dehors non plus. Pourtant, face à la crise du logement, des milliers de familles quittent la capitale pour la périphérie afin de pouvoir trouver des logements plus abordables. Au final, dans les faits, la politique du logement actuel, assumée par les socialistes, pousse les gens à quitter la ville.
Donc Monsieur le bourgmestre, que vous le souhaitiez ou non, vous faites de la gentrification dans votre commune. Soit il faut ouvrir les yeux, soit il faut arrêter de mentir consciemment. Voici quelques éclaircissements.
La gentrification est le phénomène par lequel un quartier populaire urbain voit son niveau économique augmenter : revenus des habitants, offres de services de standing, valeur immobilière, etc. Et puisqu’on est dans une situation où tout est régi par les lois du marché, eh bien, ces aménagements favorisent une hausse des prix du logement. C’est exactement ce qui se passe actuellement le long du canal, et pas qu’à Anderlecht d’ailleurs. Différents promoteurs investissement pour y construire des beaux logements avec vue sur le canal, le cadre de vie sera agréable. Ces logements coûteront cher. Et lorsque 3500 logements privés chers arrivent, ils impactent à terme les prix du marché immobilier à une échelle plus importante, à savoir les logements des quartiers et communes voisines.
Pour éviter cette gentrification tout en rénovant/construisant, il faut appliquer des politiques qui empêchent ce phénomène d’augmentation des prix. Par exemple : construire une part de logements abordables en suffisance, au moins 30 %, pour contre-carrer la production du logement privé, ou encore par un encadrement contraignant des loyers. Aujourd’hui, aucune de ces mesures n’est en place. Et ce ne sont pas les quelques 13 % de logements abordables qui vont faire pression à la baisse sur les futurs prix des 3500 autres logements haut de gamme avec vue sur le canal.
56 nouvelles places en crèche pour 15 000 nouvelles familles ? Pas de quoi s’en vanter
Monsieur Cumps aime rappeler que ce projet comptera aussi deux écoles et deux crèches. Certes, c’est une bonne chose. Mais ces équipements, nécessaires, sont payés par les charges d’urbanisme. Une sorte de taxe que les promoteurs paient pour pouvoir ensuite se faire de l’argent. Il n’y a aucun « mérite » à activer ces charges. C’est l’inverse qui serait impensable. Il n’y a pratiquement pas d’investissements propres des pouvoirs publics pour aller plus loin dans la construction de nouveaux équipements. On récupère le minimum et on fait avec. Quand vous avez près de 15 000 habitants qui vont débarquer dans votre commune, vous avez intérêt à prévoir des nouvelles écoles et crèches pour absorber toutes ces nouvelles demandes. Et encore : le bassin biestebroeck va accueillir en tout 56 places en crèche communale. Un nombre trop faible pour les milliers de familles qui arrivent. Alors qu’on sait qu’actuellement, 1400 enfants sont sur liste d’attente pour une crèche communale à Anderlecht.
Il n’est pas trop tard pour augmenter la part de logements abordables
Le PPAS Biestebroeck a été conçu il y a plusieurs années et une partie des projets est déjà construite. Pourtant, le dossier a du être rouvert pour des erreurs administratives qui ont été commises. Une occasion en or pour modifier certaines règles en demandant notamment plus de logements sociaux, en faisant payer davantage les promoteurs. La transformation du canal est nécessaire pour relancer la zone du canal et répondre au boom démographique. Mais cette transformation doit permettre aux Bruxellois de vivre mieux, sans payer plus, et leur assurer un meilleur accès aux différents services.
Aujourd’hui, le canal est plutôt un eldorado pour le business des promoteurs qu’un terrain pour répondre aux défis sociaux que connaît la Région de Bruxelles.