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La lutte contre le racisme discutée au Parlement : le point de vue du PTB

La lutte contre le racisme discutée au Parlement : le point de vue du PTB

Aujourd'hui, on votait au Parlement bruxellois un texte pour « assurer une politique de diversité et de lutte contre les discriminations au sein de la fonction publique locale bruxelloise ». Un premier petit pas mais le combat est loin d'être gagné. Retrouvez ici l'intervention de Youssef Handichi, député bruxellois du PTB

Le racisme tue

Messieurs, Mesdames les ministres, le racisme augmente et la situation est inquiétante aussi en Belgique et à Bruxelles. Les actes islamophobes, en particulier, se sont multipliés ces derniers temps.

Je pense notamment à l'agression vécue par les sœurs Zahyani, Kaoutar et Nabila, mamans allaient rechercher leurs enfants à l'école à Uccle, et qui avaient le tort d'être voilées. Elles ont témoigné avoir reçu un nombre incalculable de témoignages de victimes de faits islamophobes depuis la médiatisation de leur agression. Des agressions également sexistes dans la mesure où elles ne touchent que des femmes.

Inutile de vous rappeler que l'islamophobie tue, comme récemment en Nouvelle-Zélande ou en 2002 à Schaerbeek avec l'assassinat des parents de Kenza Isnasni. Il est plus que temps que cela cesse ! Nous avons une grande responsabilité en tant que mandataires politiques de combattre le racisme et notamment les mesures islamophobes qui visent en premier lieu les femmes voilées. Nous avons la responsabilité de combattre ce climat islamophobe et les discriminations, qui font que le racisme augmente et qui conduit à des agressions graves Trop souvent elles sont stigmatisées, discriminées, exclues de l'école, de l'emploi, victimes d'une véritable chasse aux sorcières qui ne dit pas son nom du simple fait de porter un foulard sur la tête. Il suffit de voir les multiples ROI dans les communes de notre capitale. Quelle hypocrisie ! Utiliser le faux argument de la neutralité de l'administration publique pour dans les faits exclure des jeunes filles de l'administration ou des écoles communales est un véritable scandale qui a trop duré.

Le dimanche 24 mars dernier, plus de 6 000 personnes ont marché dans les rues de Bruxelles contre le racisme et pour l'égalité et ont rendu un bel hommage aux victimes du massacre de Christchurch. Avec une plateforme signée par 158 organisations et avec 6 revendications offensives portées par le terrain depuis longtemps - la liberté de conviction philosophique et religieuse, entre autres.

 

Constat dramatique sur les politiques menées

C’est inacceptable qu’une ville multiculturelle comme Bruxelles, la 2ème plus cosmopolite au monde, voit la majorité de ses travailleurs discriminés sur le marché de l’emploi, comme l'a rappelé récemment une étude de la FGTB bruxelloise. + vous le dites vous même dans votre préambule, la Belgique reste l’un des pays où le taux d’emploi parmi les personnes issues de l’immigration est le plus bas en Europe, on est dernier élève … quelle honte, vous êtes au pouvoir depuis combien de temps ?

 

Même la Région est forcée de reconnaître la réalité des discriminations sur le marché de l'emploi et l’échec de sa politique anti-discrimination. Les déclarations non-contraignantes, la confiance en l'auto-régulation des entreprises et les innombrables chartes, labels et autres plans Diversité mis en place depuis des années, cela ne marche pas. Il n'y a eu aucune sanction, aucune condamnation sur base de l'Ordonnance anti-discrimination qui date de 2008! Suite à une longue lutte, notamment sur la question du testing (souvenez-vous de Samira-Cécile ), le Gouvernement prétend dépasser les bonnes intentions et dit vouloir prendre en main résolument le problème

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Enfin !!! C'est maintenant que le gouvernement bruxellois se décide à prendre en main les questions de la diversité et des discriminations, à quelques semaines des prochaines élections … le PTB salue ce pas en-avant et continuera le combat antiraciste auprès de l'associatif pour que les bonnes intentions soient suivies d'effets !

 

Du copier-coller

Pourtant dans votre texte de loi, il n'y a pas de véritable avancée significative par rapport à l'ordonnance du 4 septembre 2008 visant à assurer une politique de diversité au sein de la fonction publique bruxelloise, c'est quasi du copier/coller.

« Unia remarque par ailleurs qu’il serait préférable d’étendre le champ d’application de l’ordonnance du 4 septembre 2008 visant à promouvoir la diversité et à lutter contre la discrimination dans la fonction publique régionale bruxelloise à la fonction publique locale, plutôt que de maintenir deux ordonnances distinctes, désormais fort similaires dans leurs contenus et ne différant essentiellement que par leurs champs d’application » (extrait)

L’article 13 et l’article 14 posent problème, car on explique qu'une distinction directe sur un critère protégé peut ne pas être considérée comme une discrimination s'il y a justification, dans certains cas on peut trouver des justifications pour tout afin de ne pas embaucher par exemples des femmes voilées ou des personnes à mobilité réduite etc. Il aurait fallu un peu clarifier le terme justification.

Dans le commentaire sur l'Article 17 à propos des testings on nous explique que le contrôleur contre la discrimination ne peut agir à l’égard d’un employeur si et seulement s’il y a déjà eu une plainte envers lui ou de forte présomption. Toujours pas de caractère proactif, on sait que les gens ne portent pas plainte !

Manque de vraies mesures contraignantes

  • Besoin d'une Ordonnance-cadre générale sur tous les domaines de compétences de la Région, ici on se limite aux pouvoirs locaux, que la Région assume toutes ses compétences !

« S’il était des plus pertinent de combler ainsi un défaut de transposition des directives européennes en matière de lutte contre les discriminations, Unia se doit de rappeler sa recommandation générale, formulée de longue date et réitérée à plusieurs reprises, de produire, pour la Région de Bruxelles-Capitale (RBC), une ordonnance cadre générale, s’appliquant d’emblée à tous les domaines de compétence de la région, plutôt que de multiplier des ordonnances ou des ordonnances cadre limitées chaque fois à des domaines de compétence spécifiques, tels l’emploi, la fonction publique régionale, la fonction publique locale, le logement, les biens et services, etc » (extrait)

  • Lever l'interdiction du voile dans les services communaux et à l'école, supprimer les ROI excluants et discriminants : l’interdiction du port du voile sur le lieu de travail comme dans l’enseignement doit être levée. Cette interdiction est injuste et constitue un frein à l’insertion professionnelle et à l’émancipation sociale. La liberté de religion et de culte consacrée dans la loi doit être effective. Cette interdiction dans les faits, vise principalement les femmes musulmanes. Elle est injuste et constitue un frein à l’insertion professionnelle et à l’émancipation sociale. La commune se doit de respecter les convictions de chacun. La neutralité signifie que les autorités et l’administration doivent traiter tous les citoyens de manière neutre et égale. Cela ne signifie pas qu’il faut interdire aux employés communaux d’afficher leur appartenance à une communauté religieuse ou philosophique.

  • Testings : en ce qui concerne la mise en place de testings anti-discrimination (combat mené par le PTB aux-côtés de l'associatif pendant 2 ans), ceux proposés par Gosuin sont des « testing-light », sans sanction et sans caractère pro-actifs. Seuls 4 tests ont été réalisés depuis la mise en place de cette mesure pour toute l'année 2018, on se moque de qui ? La mobilisation devra continuer afin de pousser le gouvernement à agir de manière conséquente : il faut oser mettre les moyens financiers et humains suffisants, il faut oser pratiquer des testings systématiques avec sanctions à la clé, sur les marchés du logement et du travail, mais aussi par rapport à l’accès aux services administratifs, éducatifs, de santé ou encore à l’entrée des cafés et boîtes de nuit.

  • Quotas  : pour atteindre effectivement les objectifs de diversité, nous devons fixer des quotas ambitieux. Et cela doit aussi concerner les postes qualifiés et à responsabilité. La Région doit prendre elle-même ses responsabilités et mettons en œuvre des objectifs ambitieux. Des objectifs chiffrés doivent également être d'application pour la composition de la ville et du personnel enseignant en terme de diversité.

  • Installer des antennes accessibles dans chaque quartier pour porter plainte en cas de discriminations: les gens n'osent plus aujourd'hui porter plainte. Concrètement, quand allez vous faciliter aux victimes l'accès à la justice et les aider à porter plainte lorsqu'elles sont victimes de discrimination ? Les procédures sont longues, coûteuses et lourdes, les victimes sont mal reçues. Les victimes doivent être aidées plutôt qu’être abandonnées à leur sort, voire même parfois dissuadées. Nous voulons que chaque maison de quartier devienne une antenne où les citoyens puissent le faire et alerter les services communaux de l’égalité. Les formalités administratives doivent être simplifiées et l’anonymat doit être garanti: pour les personnes sans papiers, pour les personnes vulnérables, pour tous les citoyens de cette ville. L'enregistrement rapide des plaintes est essentiel pour lutter contre la discrimination.

 

Le PTB favorable à une Agence de l’Égalité capable de combattre efficacement les discriminations

Il s’agit d’une question d’intérêt général. La discrimination comme un problème de société qui impacte tout le monde. Par conséquent, c’est à l’État de prendre ses responsabilités et de mettre en place des mesures contraignantes, proactives et systématiques. C’est ce qu’il a fait avec l'agence fédérale pour la sécurité de la chaîne alimentaire (AFSCA) mise en place suite à la crise de la dioxine en 1999 pour contrôler la sécurité alimentaire, en fixant des normes et en établissant des procédures. Il est également temps de prendre le problème des discriminations à bras-le-corps avec une approche sociétale de l’égalité des droits pour tous au sein de notre société, contre l’éparpillement, il faut la concentration des moyens dans une approche transversale; une Inspection régionale pour l'Égalité qui ait pour mission de prévenir la discrimination, de la combattre et de l’éradiquer là où elle se manifeste serait un premier pas vers une Agence fédérale et serait un signal ambitieux, à la hauteur des défis et des constats dramatiques que nous avons l'air de partager.

Le Gouvernement bruxellois donnerait ainsi l'exemple.