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Si on veut lutter contre le réchauffement climatique : il faut sortir du cadre

Si on veut lutter contre le réchauffement climatique : il faut sortir du cadre

« L’avenir est encore entre nos mains », mais si on veut sauver le climat, « il faut une révolution ». Ce n’est pas (que) le PTB qui le dit. C’est la conclusion du climatologue Jean-Pascal Van Ypersele qui a co-écrit le dernier rapport du GIEC, le groupe d'experts sur le climat, sorti il y a tout juste un mois.

Mathilde El Bakri, député PTB au Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, réagit sur la résolution climat interparlementaire.

Dans l'introduction de la résolution, vous mentionnez être conscient de « l’aggravation rapide du dérèglement climatique mondial » ; vous y formulez même un call to action pour « une action forte et rapide ». Jusque-là, on est d'accord. Mais ca se corse quand on analyse l’ensemble du texte.
Ce qu'on constate, c'est q' en réalité, ce texte n'est qu’une énième résolution insuffisante et qui montre que les partis traditionnels n'ont PAS l’ambition d'agir de manière rapide ni de changer .radicalement de cap.  Il y a beaucoup de choses à dire sur ce texte mais je me limiterai ici sur deux axes qui montrent à quel point le texte de la résolution est largement insuffisant.

 

1/ Insuffisant car premièrement : Il faut agir rapidement

Qu'est-ce que nous dit la science ?


Les conclusions du 6ième rapport du GIEC sont très claires : si on veut maintenir sous contrôle les conséquences du dérèglement climatique, il faut impérativement limiter le réchauffement climatique à maximum 1.5°C.

L’enjeu central est celui de la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES). Si on veut avoir une chance raisonnable de rester sous le 1,5°C, il faut :

  • 1/ une réduction des émissions de Gaz à effets de Serre de minimum 55% d'ici 2030
  • 2/ et ensuite, une réduction de minimum 95% pour l’année 2050.
  • L’objectif intermédiaire pour 2030 est donc essentiel : retarder le passage à l'action ne fera qu'accroître les risques et les coûts du changement climatique.

Qu'est-ce que nous dis la résolution ?

Elle demande à la Belgique de « préconiser, de manière volontaire, un objectif de réduction des gaz à effet de serre plus ambitieux que les 40 % prévus d’ici 2030 ».

J'ai une question : comment définissez-vous ce qu'est un objectif plus ambitieux que les 40% prévus ? C’est combien exactement ?Pourquoi ne pas exiger, comme les Pays-Bas l’ont fait, un objectif d’une réduction de minimum 55% ? Peut-être parce que vous n’avez pas voulu brusquer le monde patronal et la FEB, qui mettait en garde le monde politique belge contre « un objectif trop ambitieux et disproportionné à l’horizon 2030 » ? J'ai une devinette pour vous. Qui a dit : que cet objectif « ne devra pas nuire à la compétitivité de l’industrie » – La FEB. Tient, tiens, on retrouve cette phrase texto dans de cette proposition de résolution.

La résolution ne s'en cache même pas et se range aux exigences de l’organisation patronale BusinessEurope, qui, dans une note interne, conseillait à ses membres de « rester plutôt positif tant qu’on en reste au niveau des déclarations politiques qui n’ont pas d’implications législatives pour 2030 », mais de « s’opposer à une augmentation des ambitions » !

 

2. Insuffisant car deuxièmement : Il faut un changement radical

Qu'est-ce que nous dit la science ?

Le scénario des 1,5 °C implique - toujours selon le GIEC - des transformations radicales et rapides dans tous les domaines de notre société. 

Qu'est-ce que nous dit la résolution ?

Il n’y a toujours pas la moindre critique ni de remise en question des politiques actuelles en matière de lutte contre le réchauffement climatique. Bien au contraire, la résolution demande que la Belgique « continue à jouer un rôle pionnier ». Ça c'est le LOL de l'année

Un rôle pionnier ? Dans quel comte de fées vous avez vu que la Belgique avait un rôle pionnier en terme de lutte contre le changement climatique? 

Les derniers chiffres montrent justement que la Belgique est à la traîne. Pire, depuis 2014, notre pays a mêm vu ses émissions augmenter. Dans son dernier rapport, la Commission européenne indique que la Belgique déraille totalement par rapport à la trajectoire pour son objectif - déjà insuffisant - de réduction des émissions de Gaz à effet de serre en 2030, qu’on dépassera de 21%!

Normalement quand vous cuisinez et que vous ratez systématiquement le même plat, vous faîtes quoi ? Vous changez de recette C'est une question de bon sens.

Mais quand il s'agit des dérèglements climatiques, aucun parti traditionnel n'est prêt à changer de recette Comment est-ce possible

C'est possible parce qu'on vit sous la capitalisme.

Et même quand il s’agit du climat, le capitalisme se fout de la loi de la nature car la seule chose qui lui importe c'est la loi du marché. Et avec cette résolution vous confirmer que la loi du marché prend le dessus sur la loi de nature. On y retrouve des idées comme quoi la politique climatique « ne peut pas perturber le marché », ou encore « la nécessité de sauvegarder la compétitivité des entreprises belges »

- On le voit notamment avec le système d'échange des quotas d’émission, qui n’est pas fondamentalement remis en question dans cette résolution. Pourtant ce commerce d’émissions a déjà largement montré qu’il est inefficace pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre. Au contraire, ce système est en fait un « permis de polluer » et constitue une nouvelle forme de spéculation sur la pollution atmosphérique. Un système qui permet aux multinationales de s’enrichir sur le dos du climat.

- On le voit avec la taxe carbone que la résolution défend. Une mesure à laquelle le PTB s’oppose fermement

Pourquoi ?

Parce que cette taxe carbone souffre de la même maladie que le système du commerce des émissions : on reste dans l’illusion que la main invisible du marché va régler la question des émissions de gaz à effet de serre. Mais en restant dans cette logique du marché, vous continuez à permettre aux multinationale de polluer tant qu'ils paient. Plutôt que le principe du « pollueur, payeur», c’est bien celui selon lequel « ceux qui peuvent payer, peuvent polluer » que vous défendez. C'est le monde à l'envers !

Une taxe carbone est non seulement inefficace, elle est aussi fondamentalement injuste, et cela à deux niveaux :

le consommateur se voit refiler la responsabilité d’une pollution qu’il ne provoque pas.

la taxe touche plus fortement les moins nantis : l’augmentation des prix des produits pèse plus lourd dans le budget des familles à faible revenu

 

3. La vision du PTB

Le problème du climat est un problème du système ; le système capitaliste qui est imposé à toute la population au profit d'une minorité. Si on veut lutter contre le réchauffement climatique : il faut sortir du cadre et arrêter de vendre du rêve en prétendant qu'un capitalisme vert est possible. Il n'y a pas que le PTB qui le dit. Naomi Klein l'explique de long en large dans son livre « Tout peut changer ».

Il faut remplacer la logique capitaliste actuelle par une approche planifiée, au travers de l’ensemble des secteurs. Cette approche planifiée implique de remplacer le système d’ETS par des normes contraignantes d’émissions maximales, définies secteur par secteur. Plus que jamais, pour sauver la planète, il y a besoin de construire une force de gauche anti-capitaliste conséquente.

Le changement, il ne faut pas l'attendre sagement mais il faut l'imposer. Réaliser le changement radical de cap, nécessite de construire le rapport de force sur le terrain. Et cela, les citoyens et le monde associatif l'ont compris.

C'est pour ça que Climate Expresse et Coalition Climat nous donne rendez-vous le 2 décembre, la veille de la COP24, dans les rues de Bruxelles, pour la justice